Altius


Cette nymphe suédoise qui s’envole à plus de 2 mètres de hauteur ( 2,01m, son record) pour franchir une barre soutenue par deux piquets représente la quintessence d’une discipline pratiquée depuis que l’homme existe, même s’il ne sautait dans les siècles passés que par jeu, par nécessité ou par défit. Bien que ce soit encore ces mêmes adjectifs qui peuvent s’employer de nos jours, on doit probablement y ajouter l’appât du gain et la gloire pour les meilleurs pratiquants devenus des professionnels de la discipline !
En dépit de la facilité apparente que ce geste semble représenter, ne nous y trompons pas, ce sont des milliers d’heure d’apprentissage qui amène à un tel niveau de perfection …accentué dans le cas d'Emma Green par une élégance et un charme manifeste.

Déjà présente dans les jeux de l’Antiquité au même titre que les courses et les lancés, c’est avec la création des Jeux Olympiques en 1896 que les disciplines athlétiques se sont retrouvées normalisées et présentées comme des exercices de concours et de dépassement de soit.

Peut-on y voir un exercice inhérent à notre nature ou  seulement un simple sport  ?
Intuitivement, l’image d’élévation qu’il traduit, comme une volonté d’échapper à notre enracinement terrien, confère bien au saut en hauteur une aura particulière.

La devise des Jeux olympiques, c'est "plus vite, plus haut, plus fort". Plus vite et plus fort, sans doute, mais plus haut, plus tellement. Le record du monde établi par le Cubain Javier Sotomayor à Salamanque en 1993 tient toujours : 2,45 m, 1 cm au-dessus de la barre transversale d'un but de foot. ( 2,09m pour les femmes depuis 1987 !)
Tous les sauteurs en hauteur utilisent la même technique de saut, inventée par l'Américain Dick Fosbury dans les années 1960. On l'a longtemps pris pour un fou, jusqu'à ce qu'il décroche aisément la médaille d'or aux Jeux de Mexico, donnant son nom à son style : le célèbre "Fosbury Flop": une course d'élan courbe, et un saut dos à la barre, obligeant le dos à se courber jusqu'à 140. 
"Ce n'est pas le fruit de la science, de mon analyse ou de ma pensée, sourit Fosbury. Non, c'est juste mon instinct. Mon esprit a poussé mon corps à trouver la meilleure façon de passer par-dessus cette barre."
Le résultat est probant : avec un saut à 2,24 m, Fosbury révolutionne son sport et décroche la médaille d'or. Au moment de son saut décisif, le public de Mexico n'a d'yeux que pour lui.
Les entraîneurs d'athlétisme ne se convertiront que progressivement à sa méthode.
Fin 2014, 15 hommes ont franchi la barre des 2,40 m. Parmi eux, Javier Sotomayor écrase la concurrence à cette hauteur stratosphérique, avec une quarantaine de sauts à ce niveau.

Aux Jeux de Barcelone, en 1992, "Soto le magnifique" ne laisse pas passer sa chance et décroche l'or. L'Espagne l'inspire : un an plus tard, à Salamanque, il porte le record du monde à 2,45 m. 


On lui promet d'être le premier à passer au-dessus de 2,50 m. Sotomayor, rebaptisé "le prince des hauteurs" par la presse espagnole, n'y croit pas : "Ce sera l’affaire d’une autre génération", explique-t-il. Une génération plus tard, son record tient toujours. Sa légende, elle, en a pris un coup. En 1999 il est contrôlé positif à la cocaïne. Deux ans plus tard, Sotomayor est positif à la nandrolone et met fin en catimini à sa carrière.

Entre 1996 et 2012, un seul sauteur franchit la barre des 2,40 m. La discipline régresse. On en vient à se demander s'il ne faudrait pas autoriser deux pieds d'appui au lieu d'un seul pour inverser la courbe des performances. Ou alors retrouver cette tribu tutsie qui franchissait 2,50 m sans difficulté, découverte par un missionnaire allemand au début du XXe siècle. 
"A moins d'organiser un championnat du monde sur la Lune, je doute fort qu'un athlète puisse un jour battre les 2,45 m de Javier Sotomayor", ironise en 2007 Jean-François Toussaint, directeur de l'Institut de recherche biomédicale et d’épidémiologie du sport. Et pourtant. D'un seul coup, une génération de sauteurs titille le vieux record : le Russe Ivan Ukhov et l'Ukrainien Bohdan Bondarenko. Le Qatari Muta EzzaBarshim, parle d'"âge d'or du saut en hauteur". Tous prédisent un record du monde à 2,50 m dans un futur proche… 


Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Ça sort du cadre !

Camille ou le plaisir de chanter

Fanny : victime des préjugés